Le mois dernier, j’ai eu la chance d’assister pour la première fois aux conférences de Paris Web. Mais surtout, j’ai eu le privilège de donner pour la toute première fois un lightning talk. J’ai pris beaucoup de plaisir à lire les retours d’autres participants ou orateurs, comme Sophie, Xibe, ou Marie. Alors j’avais envie de partager ma propre expérience.
Un lightning talk, c’est une « conférence éclair » de 4 minutes. Au delà de 4 minutes, le micro est coupé et c’est fini pour vous. A Paris Web, ce sont Daniel Glazman et Robin Berjon (du W3C) qui s’occupent d’organiser la session, où 10 orateurs se succèdent dans un amphithéâtre plein à craquer et une ambiance survoltée. Si vous voulez un aperçu, je vous invite vraiment à regarder les lightning talks de Paris Web 2011.
En juin dernier, j’ai donc répondu à l’appel à orateurs de Paris Web en proposant un sujet de conférence de 15 minutes, et un lightning talk de 4 minutes. Mon sujet de conférence, complètement hors-sujet, a été judicieusement écarté (mais donnera lieu à cet article). Le nombre de propositions de lightning talk étant peu élevés, un nouvel appel à orateurs dédié a été lancé en août. J’ai donc renvoyé ma proposition. Et à ma grande surprise, j’ai été retenu.
Voici mon sujet et l’introduction de mon lightning talk :
Le thème de Paris Web cette année, c’est la fin d’un monde, inspiré par le calendrier Maya. Je ne crois pas en ça ni en aucune religion. Mais si c’est vraiment c’est la fin du monde, je ne suis pas fou, je préfère quand même me confesser au cas où. Je vais en faire profiter tout le monde en confessant 20 pêchés du web.
Je me suis dit que 4 minutes c’était beaucoup trop court pour aborder un sujet sérieux. Alors je me suis dit que j’allais plutôt essayer de faire rire, voire juste sourire (ou même un petit rictus, quoi, vas-y décoince toi). J’avais déjà plutôt une bonne idée des 20 points que j’allais aborder (si vous êtes curieux, vous pouvez voir mes slides). J’ai passé un peu de temps à réfléchir aux commentaires humoristiques ou sarcastiques que je pourrais faire pour chaque point. Mais ce que je ne savais pas, c’est que ça demande un temps démesuré de préparer une conférence de 4 minutes. Stéphane Deschamps, qui donnait lui aussi un lightning talk, résumait très bien la chose une semaine avant :
Plus jamais je ne propose un lightning talk pour @parisweb : plus de boulot qu’une bête conf de 45 minutes, je trouve. Faut être sot.
Et dieu sait qu’il a raison. Le plus long, ce n’était pas tant de réfléchir sur mon sujet, de trouver des remarques rigolotes, ou de préparer mes slides. Non, le plus long, c’était de s’entraîner, encore et encore, tous les jours, pour tenir 4 minutes, et pas une seconde de plus. J’avais préparé des notes, dictant mot pour mot ce que je voulais dire. En répétant tout seul et en lisant mes notes, je finissais à l’aise en 3’50 (« That’s what she says« ). Par contre, la semaine venue, en répétant devant ma copine ou devant mes collègues, je dépassais de justesse les 4 minutes. J’ai donc continuer à m’entraîner, à revoir un peu mon texte, à supprimer quelques passages, à prévoir quelques raccourcis au cas où. Le matin même, en m’entraînant tout seul, à 3’55, je me sentais prêt.
Mais ça c’était sans compter sur le stress. Et je l’ai senti monter, dès le jeudi matin, en arrivant pour la première fois dans l’auditorium d’IBM pour assister à la conférence de Daniel Glazman. « Ok donc là, demain soir, c’est moi qui serait sur scène. » Aïe. « Bon bah, quitte à parler devant tout le monde, autant s’entraîner dès maintenant. » Et j’en ai donc profiter pour poser une question à la fin de sa conférence. J’avais la voix un peu tremblante, je ne trouvais pas tout à fait mes mots, mais ça s’est pas trop mal passé. Mais ça n’a pas empêché le stress de monter petit à petit. Le vendredi a été horrible. J’avais envie d’uriner toutes les 10 minutes. Les conférences de la matinée s’enchaînaient, puis vint la pause déjeuner, et les quelques conférences de l’après-midi. Et là je remettais tout en doute. Est-ce que je vais vraiment réussir à parler devant plus de 400 personnes, dont pleins de grands noms de la profession ? Est-ce que je vais vraiment réussir à faire rire de blagues qui d’habitude ne font rire que moi ? Et est-ce que je vais vraiment faire un sujet d’une liste de 20 mauvaises pratiques ? J’ai horreur des articles de listes. Pourquoi est-ce que j’ai proposé ça ! Argh !
Et puis ça y est, il était bientôt 17h, l’heure pour tous les spectateurs de se rassembler dans l’auditorium principal. Daniel Glazman et Thomas Berjon avaient préparé eux aussi un lightning talk en remplacement d’un désistement de dernière minute. Ils ont ouverts le bal, et puis c’était au tour de Sébastien Delorme et ses « 4 minutes accessibles » (à moins que ce ne soit l’inverse ? mon cerveau était en mode panique à ce moment là, alors je ne me souviens plus trop). Et puis ça a été mon tour. Je suis monté sur scène, j’ai cherché avec Daniel Glazman mes slides.
Et là il s’est passé un truc incroyable et totalement inattendu. Alors que mon premier slide est apparu devant toute la salle (avec dessus inscrit uniquement « Rémi, Intégrateur, @HTeuMeuLeu »), j’ai entendu un « bravo » et quelques applaudissements dans la salle. Alors je me suis peut-être trompé, et peut-être que ça ne m’était pas du tout destiné et qu’il s’est passé un truc dans la salle au même moment. Mais dans mon élan de narcissisme d’orateur éphémère, j’ai pris ça pour moi. Et ça m’a fait un bien fou. (Qui que vous soyez, si vraiment c’était pour moi, alors merci.)
Et c’est ainsi que je suis parti pour 4 minutes. J’ai bafouillé un petit peu dans mon introduction, omettant de dire que j’avais 20 points à présenter. « Merde, t’as oublié de dire qu’il y avait 20 points. C’est important de dire qu’il y en a 20. Vite vas-y dis le tu viens de perdre 3 secondes à réfléchir là. » Et puis tout s’est enchaîné, presque parfaitement. Les développeurs Flash étaient en colère quand j’ai dit « Pardonnez-nous d’avoir utilisé Flash au détriment de l’accessibilité, l’intéropérabilité, la maintenabilité et du référencement ». Les gens ont rit quand j’ai dit que « Comic Sans Ms, c’est une police de Connare ». Daniel Glazman s’est arraché les cheveux quand j’ai dit « Pardonnez-nous pour les préfixes navigateurs ». Et les graphistes étaient en colère quand j’ai dit « Pardonnez-nous d’avoir utiliser Photoshop pour faire du web ». Excellent.
Au final, c’était vraiment une chouette expérience. Je suis conscient que ça n’a pas plus à tout le monde (sérieusement, décoincez-vous), mais les quelques retours que j’ai pu avoir le lendemain aux ateliers ou sur Twitter étaient plutôt positifs. Et du coup, ça me motive beaucoup pour la suite. Pour continuer à tweeter, pour continuer à écrire sur ce blog, pour lancer des projets comme 24 jours de web, ou pour peut-être donner des conférences dans d’autres évènements web en 2013.