Le coût grandissant du développement interactif
R Blank, entrepreneur, formateur ActionScript et fondateur de la communauté Flash à Los Angeles, a écrit un article qui m’a fait sortir de mes gonds : « La mode majeure du développement interactif » (ou « Le coût grandissant du développement interactif » dans sa première publication).
D’un point de vue d’entreprise, la clé à retenir de cette période est que, dollar pour dollar, les expériences fourniront moins de fonctionnalités, pour un plus petit pourcentage de visiteurs. Dit autrement, produire la même fonctionnalité, livrée au même pourcentage du marché, coûtera plus cher.
Cette conclusion n’est pas un commentaire sur les valeurs particulières ni de HTML ou de Flash. C’est plutôt le reflet d’un fait sous-jacent : Adobe absorbe une portion non-insignifiante des coûts de production pour nous autres qui utilisons Flash pour livrer des expériences riches dans un navigateur. Adobe s’assure que Flash tourne de la même manière, dans n’importe quel navigateur, sur n’importe quelle plate-forme, et que vous n’avez pas à vous en préoccuper. Ainsi, Flash représente une subvention significative de la part d’Adobe au reste d’Internet.
Il n’y a aucune société investissant de manière similaire et aussi consistante pour HTML5. Au lieu de ça, HTML5 fonctionne juste comme les précédentes versions de HTML. C’est un standard international, et les différents fabricants de navigateurs l’implémente différemment. Chaque navigateur que vous souhaitez supporter accroît les coûts et le temps de production, d’abord en augmentant le temps passé en tests d’assurance qualité, puis au temps de développement passé à résoudre des problèmes spécifiques à des navigateurs qui sont inévitablement découverts.
Son point de vue est évidemment biaisé, et il y tellement de choses fausses ou erronées dans cet extrait que je ne sais pas par où commencer. Mais je partage son interrogation : un développement interactif va-t-il coûter plus cher en HTML5 qu’en Flash ?
Il n’y a aucun débat sur le fait qu’aujourd’hui, faire du développement interactif en HTML5 coûte sensiblement plus cher que du développement en Flash. Dit autrement : développer sur une plate-forme jeune de quelques années coûte plus cher que développer sur une plate-forme lancée en 1996. Ce n’est surement pas pour rien que la plupart des démos interactives qui me viennent à l’esprit (20 Things I Learned, RO.ME, Cut The Rope) sont sponsorisées par les navigateurs eux-mêmes.
Mais je suis convaincu que sur le long terme, le coût du développement interactif tendra vers zéro. Le seul coût imputé au client sera à la hauteur de ses demandes spécifiques. Je suis convaincu que de la même manière que ces 10 dernières années ont vu émerger des tonnes de CMS de grande qualité permettant de créer des sites gratuitement, ces 10 prochaines années vont voir fleurir le même genre de solutions pour l’interactivité côté client. J’en reviens exactement à ce que j’expliquais en novembre dernier, dans mon article « Flash vs. HTML5« .
Avec HTML5, un tout nouveau public découvre les joies et les possibilités de l’animation pour le web. HTML5 est un standard ouvert et gratuit. Avec HTML5, vous facturez à vos clients votre création plutôt que la technologie. Avec HTML5, votre code est constamment visible et accessible aux yeux de tous.
La philosophie de Flash est exclusive; elle pousse à la créativité aux dépends de la technique, à la fermeture et à la lucrativité.
La philosophie de HTML5 est inclusive; elle pousse à la créativité en équilibre avec la technique, à l’ouverture et au libre échange.
Mais évidemment, il s’agit ici de mon point de vue biaisé d’intégrateur. Alors voici maintenant quelques considérations factuelles pour l’avenir.
- 2007 : Apple ne supporte pas Flash sur iOS.
- 2010 : Apple n’installe plus Flash par défaut sur aucun de ses ordinateurs.
- 2011 : Adobe arrête le support de Flash sur mobiles et sur télévision.
- 2011 : Les applications HTML5 de Spotify ne supportent pas Flash.
- 2012 : Internet Explorer 10 ne supportera pas Flash dans sa version Metro.
Plus le temps passe, et moins de plate-formes supporteront Flash. En 2011, la vente d’ordinateurs a continué de chuter, au profit quasiment unique de l’iPad.
Kaelig a publié cette semaine une très bonne conclusion pour « sortir du débat Standards vs. pragmatisme » :
Ne cédez pas au buzz du moment, ne sautez pas sur les nouveautés pour l’amour du risque. Ce n’est pas seulement une affaire de professionnels du web, vous pourriez carrément mettre votre client dans le pétrin si vous manquez de vigilance sur la pérénité des choix techniques que vous effectuez.
En choisissant Flash aujourd’hui, vous assurez à vos clients que votre travail ne fonctionnera plus sur une majorité de plate-formes utilisées dans les 2 ans à venir. Qu’on le veuille ou non, Flash Player va disparaître. Ce n’est plus qu’une question de temps. Vous n’avez pas le choix. A mon avis, la vraie question à se poser pour un professionnel n’est pas « combien ça coûte ? », mais « quand dois-je m’y mettre pour rester compétitif ? ».