Adobe et le web

Hier soir, je suis tombé avec effroi devant cette bannière publicitaire :

Il y a tellement de choses de travers dans cette publicité. Adobe corrobore l’idée qu’écrire du code, c’est un inconvénient. Adobe véhicule l’idée que le code HTML est une conséquence de la conception web, et non la conception web en elle-même.

Je ne vais pas vous le cacher, je n’aime pas Adobe. Je n’aime pas leur modèle économique désuet qui consiste à vendre des logiciels près de 1000€. Je n’aime pas les interfaces honteuses de leurs logiciels. Je n’aime pas leurs formats propriétaires horriblement conçus. Je n’aime pas leur hypocrisie.

Mais surtout, je pense qu’Adobe n’a jamais rien compris au web.

La récente suractivité d’Adobe au sein du W3C est très intéressante, comme avec les filtres ou les régions CSS, même si ça ressemble aussi à une énième tentative désespérée de reproduire du print sur le web. C’est déjà un comportement moins pathétique que ça.

L’échec de Flash sur mobiles en est un bon exemple de l’incompréhension du web d’Adobe. L’horrible prototype Wallaby en est un autre. Et Muse n’en est qu’un supplémentaire.

Adobe Muse est un des derniers nés du Creative Cloud d’Adobe, disponible en abonnement pour 20$ par mois. La promesse d’Adobe est de pouvoir créer des sites « de qualité professionnelle, conformes aux derniers standards web » « sans savoir écrire de code ». En bon concepteur web, j’ai donc testé rapidement Adobe Muse en créant deux simples pages, avec un simple titre en Helvetica Neue et un paragraphe de Lorem Ipsum. Vous pouvez voir le résultat sur jsFiddle. Voici quelques remarques :

  • jQuery est inclus par défaut sur toutes les pages, même si vous n’en avez absolument pas l’utilité, ainsi qu’une plâtrée de JavaScript en dur dans chaque page.
  • Mon texte en Helvetica Neue a été transformé automatiquement en image. Ça pourrait être pertinent pour une page unique, mais comme j’utilise cette police ailleurs sur mon site, il aurait été plus pertinent d’opter pour l’inclusion une police en CSS.
  • Le code HTML est peu sémantique, et truffé de balises inutiles.
  • Le code CSS n’utilise pas tous les préfixes navigateurs (comme les horribles déclinaisons de device-pixel-ratio)
  • Quand vous créez un nouveau site dans Adobe Muse, la première chose qu’on vous demande, c’est la largeur et la hauteur de votre site web. Et moi qui croyais que j’allais faire du web.

Je ne vais pas y passer des heures, mais vous avez compris l’idée : on est loin, mais alors très loin du travail qu’un intégrateur professionnel doit réaliser. Alors bien sûr, il y a déjà eu pas mal d’améliorations dans Muse depuis son lancement en 2011. Mais je doute que le logiciel ne parvienne un jour à atteindre la qualité du travail d’un professionnel.

Et c’est là pour moi le problème. Adobe essaie de vendre Muse comme un logiciel professionnel. Muse n’est pas un logiciel professionnel. C’est un logiciel amateur, pour des amateurs, destiné à faire des sites de qualité amateur.