La théorie espagnole

La semaine dernière, je suis tombé sur un article intitulé : « Tous les projets logiciels sur lesquels j’ai travaillé ont utilisé la théorie espagnole de gestion de projets, et il y a des chances pour que les votre aussi« .

Et effectivement, ce fut le cas. Pour expliquer la théorie en question, l’auteur cite le livre « Peopleware: Productive Projects and Teams » de Tom DeMarco et Thimoty Lister.

Les historiens ont établi il y a longtemps une abstraction de différentes théories de valeur : la théorie espagnole, pour sa part, disait qu’il n’existait qu’une quantité fixe de valeur sur Terre. Ainsi, le chemin vers l’accumulation de richesse consistait à apprendre comment l’extraire plus efficacement du sol ou des gens.

Et puis il y a eu la théorie anglaise qui stipulait que la valeur pouvait être créée par de l’ingéniosité et la technologie. Ainsi les Anglais ont eu une révolution industrielle, pendant que les espagnols perdaient leur temps à exploiter le terrain et les indiens dans le Nouveau Monde. Ils ont déplacé d’énormes quantités d’or à travers l’océan, et tout ce qu’ils ont gagné de leurs efforts a été une énorme inflation (beaucoup trop d’or chassaient trop peu de biens).

La théorie espagnole est bien vivante parmi les managers un peu partout. Vous le voyez quand ils parlent de productivité. La productivité signifie réaliser plus en une heure de travail, mais bien trop souvent elle signifie soutirer plus pour une heure de paye. Il y a une grosse différence. Les managers de la théorie espagnole rêvent d’atteindre de nouveaux niveaux de productivité grâce au simple mécanisme du travail supplémentaire impayé. Ils divisent le travail réalisé en une semaine par 40 heures, et non pas par les 80 ou 90 heures que le travailleur a réellement passé.

Ce n’est pas vraiment de la productivité — c’est plus de la fraude — mais c’est le dernier cri pour de nombreux managers américains. Ils intimident et gratifient leurs équipes de très longues heures de travail. Ils leur font comprendre à quel point la date de livraison est importante (même si c’est peut être totalement arbitraire; le monde ne va pas s’arrêter juste parce qu’un projet se finit un mois plus tard). Ils les piègent en leur faisant accepter des plannings désespérément serrés, les poussent à sacrifier tout pour tenir la date butoir, et feront n’importe quoi pour les faire travailler de plus en plus fort.

Vous n’avez pas idée à quel point tout ceci résonne de mes précédentes expériences professionnelles.

Bonus : ça me fait aussi penser aux 20% de temps libre chez Google vus par Dilbert.